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Approche scientifique de l'ostéopathie
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A-t-on aujourd'hui la preuve de l'efficacité des techniques myofasciales (Myofascial release)?

A-t-on aujourd'hui la preuve de l'efficacité des techniques myofasciales (Myofascial release)?

A-t-on aujourd'hui la preuve de l'efficacité des techniques myofasciales (Myofascial release)?

Même si l'ostéopathie est décrite comme une approche holistique, elle n'en repose pas moins sur un ensemble de techniques qui se trouvent régulièrement évaluées en thérapie manuelle. Il est donc intéressant d'y jeter un œil régulièrement.

Lorsqu'un article parle de myofascial release, elle peut regrouper plusieurs types de technique:

  • Les techniques reposant sur les trigger points (Jones, Travell)
  • Les techniques à visée fasciale (fonctionnelle, structurelle, active, passive).
  • Les étirements (Stretching).

L'ensemble est assez large, et impose de savoir précisément ce dont l'article traite.

Les techniques reposant sur les trigger points:

 

L'existence des trigger points est communément admise dans la pratique clinique, cependant le modèle explicatif sous-jacent est sujet à caution, de même que le traitement qui pourrait être le plus approprié.

Son étude est le plus souvent abordée dans le cadre d'un syndrome douloureux myofascial tel que la fibromyalgie. Leur présence est également constatée dans un cadre asymptomatique, mis aussi dans le cadre de certaines blessures sportives ou professionnelles dues à un déséquilibre musculaire.

Il y a deux types de trigger point, ceux responsables de la douleur du patient (ils reproduisent la douleur du patient) mais aussi les trigger points latents douloureux seulement à la palpation ou à l'effort. Malheureusement, ils sont tous peu reproductibles (Score kappa d'environ 0,3), même s'il est possible d'améliorer un peu ce score par l'entrainement. Cela constitue un biais de taille.

Les études (histologique, par ultrason, par thermographie) pour le moment peinent à objectiver les trigger points. Seule une étude par biopsie a mis en évidence chez les patients fibromyalgiques la présence de niveaux altérées en certains phosphates. La pathogénèse reste donc basée sur des hypothèses (Energy crisis theory, Motor end plate hypothesis, Radiculopathic model for muscular pain) qui n'ont pas encore été suffisamment confirmées expérimentalement.

Néanmoins, certaines conditions peuvent être à l'origine de leur apparition: Charge d'entrainement en reprise de saison, mauvaise posture de travail (ergonomie), après un traumatisme. Les trigger points sont aussi influencés par le stress et l'altération de l'état général. Les cartographies de leurs emplacements semblent peu fiables mais pas leur capacité à reproduire la douleur du patient.

Leur prise en charge pourrait améliorer la douleur et la mobilité articulaire. Sur la manière de les prendre en charge en thérapie manuelle, les étirements combinés aux massages semblent donner les meilleurs résultats sur la douleur.

Les techniques à visée fasciale:

Ces techniques se concentre à redonner aux tissus de soutien une fonction optimale dans l'idée d'avoir un effet à grande échelle et surtout à distance. Elles se font à faible amplitude et à faible vitesse de manière direct ou indirecte avec parfois l'implication du patient par des mouvements spécifiques.

Les recherches sur le sujet explore ce tissu conjonctif à la recherche d'éléments qui pourraient sous-tendre l'effet observé cliniquement. Tantôt est mis en évidence une possibilité contractile involontaire du tissu, tantôt il s'agit du fibroblaste qui est mis en avant. À vrai dire, la recherche bat son plein et les réponses ne sont pas encore claires mais reste une piste intéressante de futurs développements de l'ostéopathie et d'un outil diagnostique global.

Cette prise en charge pourrait améliorer la douleur et la mobilité articulaire mais reste sans effet sur le produit de l'activité musculaire (Pas de changement de la force musculaire, ni de la pré-activation du muscle). Cela indiquerait qu'elle ne présente pas de désavantage à être utilisée dans le cadre sportif en bord de terrain, puisque cela ne viendra pas entraver la performance sportive tout en aidant à résoudre la plainte du patient.

Les étirements passifs :

Il existe de nombreuses études sur l'étirement, son intérêt ou non dans un cadre sportif en dehors des termes myofascial release et amènent le plus souvent à des résultats assez contradictoires encore aujourd'hui.

Dans la revue de littérature systématique s'intéressant à un étirement passif des tissus mous en tant que technique de myofascial release, la conclusion montre que les résultats sont intéressants pour l'amplitude du mouvement, la diminution de la douleur, la gène ressentie, la statique du bassin, la posture, la fonction pulmonaire. Cependant, le niveau des preuves des études est faible. Un autre point important est que les études retenues utilisaient une combinaison de manipulations vertébrales, de massages, de rééducation, ou de techniques sur les trigger points. Il n'est donc pas possible de conclure à l'effet seul de l'étirement des tissus mous.

Conclusion?

En conclusion, ces revues de littérature systématique (Système PEDro) sur les techniques myofasciales semblent montrer leur intérêt sur un certain nombre de points (Douleur, Amplitude articulaire, qualité de vie). Cependant, il faut pointer le fait que souvent, elles ne peuvent s'appuyer que sur une dizaine d'article. La plupart des autres articles n'est pas retenue pour des raisons liées à leur niveau de preuve, aux tailles d'échantillon et à des biais trop importants. Enfin, une seule méta-analyse existe et elle s'applique à la comparaison de différents types de "massage" (est ce vraiment le bon terme?) dans le cadre de la fibromyalgie. Seul le myofacial release a un niveau de preuve moyen de son efficacité à court et moyen terme (là où le shiatsu, le drainage lympathique, le massage des tissus mous ont un effet mais avec un faible de niveau de preuve, et le massage suédois aucun effet). Ainsi, cela montre que malgré une certaine abondance de littérature, les études sont à de bien trop petites échelles. Il existe une tendance de fond qui montre que le myofascial release fonctionne, mais il faudrait une étude de plus grande envergure pour l'asseoir définitivement.

Enfin, il serait peut-être intéressant de faire évoluer la terminologie en évitant un terme trop générique pour désigner des techniques très différentes.

Dernier point, il est intéressant de voir dans la littérature l'apparition du self myofascial release, où il est question que le sportif se traite seul souvent par étirement mais aussi par le biais d'objet conçu dans ce but tel que le foam rolling. Il semble montrer des effets intéressants sur l'amplitude de mouvement à court terme, la raideur musculaire mais sans entraver les performances des sportifs (à l'exception des étirements). Mais ces études souffrent des mêmes manques méthodologiques que les études sur le myofacial release.

Note à part: Une réponse à un article veut nous expliquer pourquoi l'evidence based ne peut exister dans la thérapie manuelle. Il faut arrêter avec certains poncifs que l'on peut encore lire ou entendre comme quoi il n'est pas possible d'avoir de l'evidence based en osteopathie car: -rayer la mention inutile- aucun instrument ne remplace la main du praticien, le diagnostic est trop complexe, la technique seule n'est pas de l'ostéopathie, c'est un art, une danse avec le patient. Il faut démarrer quelque part, et nous pouvons voir que finalement, il y a la possibilité de démontrer des choses. La seule difficulté actuelle réside dans la mise au point des protocoles fiables qui s'avère il est vrai très complexe, mais aussi leur financement et que cette culture de la recherche est tout juste balbutiante dans une profession qui n'a pas encore (voulu?) trouver les moyens de créer une vrai profession de chercheur en ostéopathie.

Sources:

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Beardsley C, Škarabot J., Effects of Self-Myofascial Release: A Systematic Review, Journal of Bodywork & Movement Therapies, 2015, doi: 10.1016/j.jbmt.2015.08.007.

Bellaud E, Renault D, Gremion G, Bertucci W, Connaissances actuelles sur les effets des étirements: aspects théoriques et pratiques, partie 1: aspects théoriques, la revue de l'ostéopathie, 2013, 9(1): 17-30.

Bellaud E, Renault D, Gremion G, Bertucci W, Connaissances actuelles sur les effets des étirements: aspects théoriques et pratiques, partie 2: aspects pratiques, la revue de l'ostéopathie, 2013, 10(2): 23-28.

Bordoni B, Zanier E, understanding fibroblasts in order to comprehend the osteopathic treatment of fascia, Evidence-based complementary and alternative medecine, 2015, Article ID 860934, 1-7.

Huguenin LK, Myofascial trigger points: the current evidence, Physical Therapy in Sport, 2004, 5: 2-12.

Kidd RF, Why myofascial release will never be evidence-based, International musculoskeletal medecine, 2009, 31(2): 55-56.

Mauntel TC, Clark MA, Padua DA, Effectiveness of myofascial release therapies on physical performance measurments, a systematic review, athletic training and sports health care, 2014, 6(4): 189-196.

Mc Kenney K, Sinclair Elder A, Elder C, Hutchins A, Myofascial release as a treatment for orthopaedic conditions : a systematic review, journal of athletic training, 2013, 48(4): 522-527.

Schultz RL, Feitis R, The endless web, fascial anatomy and physical reality,1996, Berckeley: North atlantic book,131p.

Willard FH, Vleeming A, Schuenke MD, Danneels L, Schleip R, The thoracolumbar fascia: anatomy, function and clinical considerations, Journal of Anatomy, 2012, 221(6): 507–536.

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