"Hamlet et Horacio au cimetière" gravure sur bois gravée par F. Wentworth. 1870 (http://www.galerie-napoleon.com/product_info.php?products_id=6714)
Le rapport ces dernières semaines fait parler de lui. Levée de bouclier de la part de certains ostéopathes, beaucoup de questions soulevées par d'autres... Bon, maintenant que quelques jours sont passés, prenons les choses à froid.
Cortecs ou corteX, c'est "un collectif d’enseignement et de recherche en esprit critique et sciences. Il est né en 2010 à l’Université de Grenoble à l’initiative de cinq formateurs professionnels et a pour objectif de mettre à disposition les travaux de tous les acteurs – enseignants, chercheurs, étudiants – travaillant sur un sujet développant le critical thinking, l’esprit critique, quelle que soit leur origine disciplinaire."
Ce collectif a son site, et donne régulièrement des conférences. Ce groupe milite pour l'esprit critique et de fait se rapproche de ce qu'on appelle la zététique, ou scepticisme scientifique.
Il est l'auteur d'une conférence sur l'efficacité sur l'ostéopathie l'an passé.
Ce courant de pensée et de pratique scientifique cherche à développer le sens critique chez ses contemporains et défaire les argumentaires pseudo-scientifiques. Il s'agit de lutter contre les biais cognitifs (biais de croyance, biais de confirmation etc...) pouvant parfois entretenir de fausses croyances. Les vidéos sur le sujet sont légions avec des chaines youtube comme la tronche en biais, Instant sceptique, Hygiène mentale ou celle de florent MARTIN.
Je pense que leur approche est intéressante et qu'elle a le mérite de soulever certaines questions sur des pratiques en sciences, en médecine, ou dans notre discipline.
Il faut définir le but du document. Pour reprendre leurs termes,"Demande nous a été faite de réaliser un examen scientifique des fondements et de la pratique de l'ostéopathie crânienne". Nous devons donc nous attendre à un examen scientifique, c'est donc sur ce point que j'examine le rapport. Je tâcherai d'analyser leur conclusion en fin d'article.
Le rapport précise d'abord quelques éléments sur l'ostéopathie (les différents types de techniques), puis fait un point sur le concept sous-tendant l'ostéopathie crânienne. Il tente d'en identifier le fondateur (WG Sutherland) et ceux qui ont continué à développer le concept.
Les sources bibliographiques sont les ouvrages issus du catalogue des éditions Sully, le JAOA, quelques sites internet (cranial academy, le site de l'ostéopathie, approche tissulaire de l'ostéopathie) obtenues par recherche sur un moteur de recherche généraliste.
Malheureusement, ce ne sont pas là les seules sources sur le concept. Il manque l'ouvrage de Nicette Sergueef , sans parler de celui d'A Croibier sur le diagnostic général ostéopathique (qui reste un livre important pour étudier en partie le fonctionnement du raisonnement ostéopathique) aux éditions Masson ou un ouvrage de référence de T Liem aux éditions Maloine. Il faut noter que certains ouvrages apparaissent sur le site de l'ostéopathie en fouillant les articles sur les ouvrages ou avec des termes comme "crâne", "crânienne", "crânien". Je suis étonné que, les auteurs du rapport ayant l'occasion d'échanger avec des ostéopathes (c'est noté dans les remerciements), ces sources n'aient pas été évoquées. De même, puisqu'utilisant un moteur de recherche généraliste qui est probablement google (on peut le supposer étant donné que google scholar est cité plus tard dans le rapport), les auteurs auraient pu utiliser google books où toutes les références citées plus haut ressortaient.
Poussons un peu plus loin et soyons indulgents sur le fait qu'ils ne connaissent pas les ouvrages d'ostéopathie en dehors des éditions Sully (car n'étant pas du métier). Ils previennent que ce sera succint, sauf que même en suivant leur méthode, il y a une part du concept plus récente (basée la tenségrité) qui n'est pas prise en compte comme l'ouvrage de Gilles Boudéhen qui fait partie du catalogue des éditions Sully. Alors comment ont-ils vraiment fait leur recherche bibliographique? Celle-ci est vraiment limitée, comment juger objectivement de l'aspect scientifique d'un concept en étudiant la partie qui n'a pas été mise à jour au niveau des connaissances scientifiques actuelles?
L'ensemble comporte quand même une bonne part de concept originel de l'ostéopathie dans le champ crânien, et surtout ce qui en fait un concept reposant sur des bases tout à fait discutables. Sur cette partie, il n'y a rien à redire.
En fait, ce qui est dommageable, c'est que le seul concept décrit par ce rapport fait suite à celui de MRP. Et tout le concept développé depuis sans le MRP n'est pas pris en compte, du fait de la méthodologie qui limite l'étude qui a été faite par les auteurs.
La méthodologie est un peu plus carrée puisqu'elle interroge des bases de données de revues indexées. La revue de littérature sur la fréquence d'utilisation ne permet pas d'extrapoler car la plupart des études concerne le monde anglophone dont la formation, le cadre législatif sont différents du nôtre. On voit notamment que le pourcentage peut varier de manière importante en fonction de l'étude. La seule étude regroupant plusieurs pays implique un biais puisque l'organisme qui sert de base de contact est un organisme de formation d'ostéopathie dans le champ crânien. L'ensemble de ces problèmes est souligné par les auteurs.
Concernant le côté du résumé du cadre législatif, il y a un petit problème avec ce paragraphe
C.3 Pratique
Les ostéopathes n'ont pas le droit de pratiquer un certain nombre d'actes s'il ne sont pas "soumis à diagnostic médical préalable de non contre-indication". Parmi ces actes, on note les "manipulations du crâne".
Or, dans les décrets qui auraient pu être cités en entier, il était fait mention d'un élément supplémentaire qui change le champ d'application de la restriction de prise en charge. Premièrement ça ne rajoutait pas beaucoup plus de lignes et surtout, deuxièmement, ça évitait une erreur factuelle:
Article 3
I. - Le praticien justifiant d'un titre d'ostéopathe ne peut effectuer les actes suivants :
1° Manipulations gynéco-obstétricales ;
2° Touchers pelviens.
II. - Après un diagnostic établi par un médecin attestant l'absence de contre-indication médicale à l'ostéopathie, le praticien justifiant d'un titre d'ostéopathe est habilité à effectuer les actes suivants :
1° Manipulations du crâne, de la face et du rachis chez le nourrisson de moins de six mois ;
2° Manipulations du rachis cervical.
III. - Les dispositions prévues aux I et II du présent article ne sont pas applicables aux médecins ni aux autres professionnels de santé lorsqu'ils sont habilités à réaliser ces actes dans le cadre de l'exercice de leur profession de santé et dans le respect des dispositions relatives à leur exercice professionnel.
On voit que cette restriction concerne la prise en charge des nourrissons. Il existe donc un risque de confusion. Cette erreur rédactionnelle met aussi en évidence qu'il est sans arrêt question de manipulation crânienne sans jamais que soit défini ce terme. C'est embêtant d'évaluer l'ostéopathie dans le champ crânien sans définir le geste que ça implique. Si on fait une recherche dans le document avec les termes "manipulation crânienne", jamais le terme n'est associé à une quelconque définition.
La méthodologie est décrite et semble avoir essuyé quelques écueils. Il semble que ces difficultés ne leur aient pas permis de faire une revue de littérature dans les "règles de l'art". Sachant qu'un certain nombre d'ouvrages de référence dont nous avons parlés précédemment ne seront pas cités davantage dans cette partie, il va donc manquer un pan entier des modèles physiopathologiques. Néanmoins, concernant les modèles étudiés, il est évident que leurs conclusions sont valides:
En l'état actuel des connaissances, il n'y a aucune raison de penser que le MRP existe.
C'est vrai que les preuves de ce mouvement n'existent pas. Les rares études qui amènent des résultats souvent sont discutables sur le plan méthodologique. L'agument classique "L'absence de preuve n'est pas la preuve de l'absence" n'est pas un argument valable.
Bien que les ostéopathes suggèrent une mobilité au niveau des os de la face, aucune étude identifiée n'explore ce point. Certaines hypothèses ostéopathiques (qui ne sont en fait pas spécifiques aux ostéopathes) sont soutenues par les connaissances actuelles.
En fait la seule hypothèse prouvée est celle que les sutures crâniennes ne sont pas totalement fusionnées. C'est d'ailleurs la seule qui ne fait pas débat. Concernant une mobilité des os du crâne et la possibilité de la mesurer, nous en avions déjà parlé dans un précédent billet de ce blog.
Ces études souffrent malheureusement de limites majeures; il n'est donc pas possible de s'appuyer sur leurs résultats pour étayer scientifiquement les hypothèses ostéopathiques concernées [...] Certaines hypothèses ostéopathiques (qui ne sont en fait pas spécifiques aux ostéopathes) sont soutenues par les connaissances actuelles.
Dans l'idée, seul le fait que le LCR soit en mouvement et que son défaut de circulation soit source de pathologies (hydrocéphalie, hypertension intracrânienne,...) est prouvé. Pour le reste, il n'y a pas de preuve que le LCR soit à l'origine d'un mouvement au niveau des os du crâne et que les manipulations puissent avoir un effet dessus.
Il n'y a à notre connaissance aucune étude accessible permettant d'étayer l'existence d'une mobilité involontaire de l'articulation sacro-iliaque en lien avec le cadre de l'ostéopathie crânienne.
La partie concernant l'articulation est assez succincte. Concernant les limites de tests de mobilité classiques, elle peuvent être dûes à la variabilité de cet os et de ses articulations (qui avaient fait l'objet de deux billets de blog précedemment: ici et ici).
Sans article scientifique disponible, l'hypothèse de ce mouvement ne peut être analysée, discutée et est donc logiquement rejetée d'un point de vue méthodologique.
Aucune étude accessible ne permet d'étayer la possibilité de mobiliser les membranes de tension réciproque par des techniques manuelles. À moins de publications à venir l'étayant, cette hypothèse n'est donc pas vérifiée. Le concept de MRP n'étant pas lui non plus démontré, il n'est pas soutenable de penser que les membranes de tension réciproque jouent un rôle dans la mobilité des os du crâne et de la face (elle non plus infondée scientifiquement) ou dans la mobilité involontaire du sacrum (idem).
La conclusion est assez logique par rapport à la partie précédente. Sans publication disponible, pas d'analyse possible.
Bien que ce soit le concept le plus décrit en BOCF (pour Byodynamic Osteopathy in the Cranial Field, traduisible en français en: ostéopathie biodynamique dans le champ crânien), et en l'absence d'étude portant concrètement sur la mise en évidence du concept de souffle de vie, nous avons logiquement renoncé à mener une recherche documentaire dans les bases de données scientifiques pour les autres concepts "esotériques", qui sont par ailleurs constamment définis de manière vague ou polysémique y compris au sein d'ouvrages similaires.
Les auteurs n'ont trouvé aucune publication scientifique sur cette partie du concept, ce qui n'a rien d'étonnant en soi. Pour autant, ils ont procédé à une étude épistémologique qui est vraiment intéressante et qui mérite d'être lue. Elle souligne l'aspect très vitaliste de ce concept mais ceux qui ont lu les ouvrages de Still, Littlejohn ou Sutherland savent que leurs écrits sont vitalistes.
Et c'est tout pour les modèles physiopathologiques... Comme nous l'avions précédemment souligné, la partie sur le concept étant déjà incomplète, cette partie là ne pouvait en être autrement.
Les auteurs s'attaquent maintenant à une autre partie importante, est ce que les tests sont reproductibles et de ce fait, peut-on les utiliser pour bâtir un protocole?
Les auteurs ont trouvé trois revues de littérature sur le sujet:
Nous constatons que ces trois revues convergent toutes sur le défaut de preuve de la reproductibilité intra et inter-observateur des tests et procédures diagnostiques issus de l'ostéopathie crânienne.
Les trois précédentes revues de littérature avaient déjà conclu à un problème de reproductibilité des tests, jetant l'opprobre sur les autres études dont les protocoles étaient basés sur ces mêmes tests. Cependant, les auteurs ont tout de même procédé à leur propre revue de littérature car de nouvelles publications ont été publiées depuis la dernière revue de littérature (1999).
Cette analyse repose sur l'utilisation d'une grille d'analyse QUAREL (qui en fait s'écrit correctement QAREL). C'est un outil d'une bonne qualité (Lucas et al, 2013)pour évaluer la reproductibilité de certains tests dans un contexte de revue systématique. Il a cependant quelques limites surtout quand le test en question n'a pas de moyen d'évaluation fiable disponible (une sorte de gold standard). Les Items 9 et 10 sont notamment source de biais pour cet outil où les questions sont subjectives. Ces limites sont soulevées par les auteurs qui pointent notamment:
En conséquence, les auteurs font un questionnaire simplifié mélangé à celui du groupe Cochrane (risk of bias tool). Ils procèdent à l'ajout d'un item crée pour l'occasion. Ce choix peut être discutable dans le sens où le mélange et la modification de questionnaires valides ne créent pas forcément un outil exempt de biais. Néanmoins, en l'absence d'outils standardisés pour la situation en question, cet outil permet une première approche. Je vous laisse lire chaque grille d'étude pour chaque article étudié par les auteurs pour prendre connaissance des biais revelés.
Mais pour faire simple:
En résumé, l'analyse faite pour cette partie est intéressante mais l'outil employé pour l'analyse des biais est discutable du fait de ses modifications par rapport à l'outil validé et de l'attribution d'un biais élevé systématique par manque de description du protocole. Les scores ICC parlent d'eux-mêmes, et sans analyser le biais, la reproductibilité est de toute façon faible.
Les auteurs ont mis en évidence 4 revues de littérature sur les sujets:
Nous observerons que ces quatre revues convergent toutes vers un défaut de preuve de l'efficacité des techniques et stratégies thérapeutiques issues de l'ostéopathie crânienne.
Les auteurs, devant le fait qu'il y ait eu depuis la dernière revue d'autres publications, vont effectuer eux-mêmes leur propre revue de littérature.
Ils relèvent qu'un protocole en triple aveugle (patient, praticien, analyste) n'est pas applicable en thérapie manuelle pour le praticien, mais que les protocoles qui tentent de le faire pour les deux autres acteurs vont dans le bons sens.
Les auteurs vont utiliser l'outil de cochrane cité précédemment, mais seul (sans le QAREL, non adapté à l'analyse).
En résumé, il y a en général un grand risque de biais du fait de l'absence de données sur l'aspect aveuglement des trois acteurs de la recherche, soit sur la randomisation dans le protocole, soit sur les données manquantes. Les articles ne sont donc pas assez détaillés pour que les résultats puissent être correctement analysés, et quand il le sont, il y a des manques qui portent préjudice aux résultats.
Seuls 2 études sortent du lot avec un risque de biais raisonnable (Elden et al., 2013, Haller et al., 2015).
Le concept étudié est amputé de sa partie la plus récente basée sur d'autres principes que le MRP. J'ai cependant quelques réserves sur ce nouveau concept qui ne fait pas davantage preuve de sa véracité dans le cadre de l'ostéopathie crânienne que l'ancien concept.
Elden H et al., Effects of craniosacral therapyas adjunct to standard treatmentfor pelvic girdle pain in pregnant women: a multicenter, single blind, randomized controlled trial, Acta obstetrica et gynecologica sacandinavica, 2013, 92(7):775-82.
Gabutti M, Draper-Rodi J, Osteopathic decapitation: Why do we consider the head differently from the rest of the body? New perspectives for an evidence-informed osteopathic approach to the head, IJOM, 2014, 17(4): 256–262.
Grenn C, et al, A systematic review of craniosacral therapy: biological plausibility, assessment reliability and clinical effectiveness. 7(4):201-7.
Guillaud A et al., L'ostéopathie crânienne, Rapport CORTECS, Octobre 2015, 268p (consulté le 16/02/2016, ici)
Haler H et al, Craniosacral Therapy for the Treatment of Chronic Neck Pain: A Randomized Sham-controlled Trial. Clin J Pain, 2015, Online Ahead of print.
Jackel A, review to evaluate the clinical benefits of craniosacral therapy,Complement Ther Med, 2012 ;20(6):456-65.
A systematicTherapeutic effects of cranial osteopathic manipulative medicine: a systematic review, JAOA, 2011; 111(12):685-93.
Lucas N et al., The reliability of a quality appraisal tool for studies of diagnostic reliability (QAREL), BMC Medical Research Methodology,2013, 13:111. (En open access ici)
Raith W et al, General Movements in preterm infants undergoing craniosacral therapy: a randomised controlled pilot-trial, BMC complement Altern Med, 2016, 16(1):12.
Tricot P, Le mécanisme respiratoire existe-t-il ?, Apostill, 2000, 6: 3-8.
Je remercie le collectif Cortecs d'avoir pris le temps de répondre aux points que j'avais soulevés dans l'article ci-dessus.
À leur demande, je place leur réponse à la suite de mon texte afin de faciliter la lecture de l'échange. Je prendrai le temps de repondre à cette dernière d'ici peu. En attendant, très bonne lecture !
L'absence de preuve scientifique concernant l'efficacité de la pratique n'est pas une nouveauté en soi. Ce fait est connu et c'est pourquoi des études sont toujours en cours pour essayer de démontrer un effet et une indication de ce type de thérapie (Raith et al, 2016, Haler et al, 2015, Elden et al, 2013) avec des protocoles plus ou moins bien bordés. Les résultats sont mitigés en fonction des études mais certains semblent montrer un effet intéressant ainsi qu'une absence d'effets secondaires gênants.
Actuellement, il n'y a que 2 articles relevés par les auteurs qui montrent un résultat intéressant sur les cervicalgies et le syndrome douloureux pelvien gravidique.
Concernant les études de Haller et al et de Elden et al, comme vous l'avez lu dans notre rapport nous ne partageons pas votre interprétation. Nous écrivions :
« Les deux preuves méthodologiquement valables que nous avons trouvées présentent de modestes résultats qui, pour diverses raisons que nous avons évoquées, peuvent raisonnablement s'interpréter en terme d'efficacité non spécifique des traitements. »
Bien sûr, cette interprétation est longuement argumentée dans notre rapport et ne tombe pas du ciel.
Pour l'étude de Raith et al nous n'avons rien exprimé et pour cause ! Cette publication est postérieure à notre revue de littérature.
Malheureusement, ce ne sont pas là les seules sources sur le concept. Il manque l'ouvrage de Nicette Sergueef , sans parler de celui d'A Croibier sur le diagnostic général ostéopathique (qui reste un livre important pour étudier en partie le fonctionnement du raisonnement ostéopathique) aux éditions Masson ou un ouvrage de référence de T Liem aux éditions Maloine. Il faut noter que certains ouvrages apparaissent sur le site de l'ostéopathie en fouillant les articles sur les ouvrages ou avec des termes comme "crâne", "crânienne", "crânien".
Nous vous encourageons à lire ou relire en détail la méthodologie suivie dans cette partie du rapport pour comprendre pourquoi ces références n'apparaissent pas. En effet, nous avons relevé uniquement les concepts élaborés par le fondateur et les continuateurs de l'ostéopathie crânienne, identifiés dans la partie précédente du rapport ; Nicette Sergueeg, A Croibier et T Lien ne font pas partie de ces personnes. Ce choix méthodologique, qui a ses limites, permet de rendre notre méthode reproductible et incrémentale. Nous ne travaillons plus directement sur ce sujet, mais rien n'empêche qu'une autre équipe aille plus loin en exploitant d'éventuels points aveugles de notre méthodologie..
Je suis étonné que, les auteurs du rapport ayant l'occasion d'échanger avec des ostéopathes (c'est noté dans les remerciements), ces sources n'aient pas été évoquées.
Elles n'ont effectivement pas été suggérées par les différentes personnes contactées – mais il est difficile de leur en tenir grief. Il est probable qu'autant de contacts, autant de sources possibles. Cela corrobore notre impression que si le « feuillage » de l'ostéopathie crânienne est partout, il est assez difficile de bien distinguer un tronc solide.
De même, puisqu'utilisant un moteur de recherche généraliste qui est probablement google (on peut le supposer étant donné que google scholar est cité plus tard dans le rapport), les auteurs auraient pu utiliser google books où toutes les références citées plus haut ressortaient.
Détrompez-vous : ces références ne ressortent pas si l'on suit de manière précise la méthodologie décrite dans le rapport, qui cherchait à identifier les sources bibliographiques du fondateur et des continuateurs (voir supra). Maintenant, rien ne vous empêche de changer de méthodologie et de refaire le travail.
Poussons un peu plus loin et soyons indulgents sur le fait qu'ils ne connaissent pas les ouvrages d'ostéopathie en dehors des éditions Sully (car n'étant pas du métier).
Merci de votre indulgence – au sens canonique, l'indulgence est une rémission de la peine encourue du fait d'un péché. Ouf !
Vous faites assurément un effet paillasson en mélangeant « ne connaissent pas » et « ne jugent pas majeurs selon la méthodologie employée »
Et comme vous pouvez le constater vous-même les ostéopathes avec lesquels nous avons échangé semblent eux non plus soit ne pas connaître, soit ne pas juger majeurs les ouvrages que vous évoquez. Pensez-vous réellement qu'il suffit d'« être du métier » pour connaître tous les ouvrages pertinents en rapport avec ce métier ? Appliquer cela à de nombreux métiers, de boulanger à prêtre, de cordonnier à prostitué, suffit à en douter.
Ils previennent que ce sera succint, sauf que même en suivant leur méthode, il y a une part du concept plus récente (basée la tenségrité) qui n'est pas prise en compte comme l'ouvrage de Gilles Boudéhen qui fait partie du catalogue des éditions Sully. Alors comment ont-ils vraiment fait leur recherche bibliographique?
Si vous lisez le rapport, vous saurez comment notre recherche méthodologique a été faite. Il vous appartient de l'améliorer si vous le jugez nécessaire. A toutes fins utiles, vous pouvez agglomérer toutes les études qui vous paraissent manquer et contacter le Conseil national de l'ordre ici (http://www.ordremk.fr/formulaire-de-contact/) pour pousser plus loin notre rapport. Mais la question reste celle-ci : ces « nouvelles » publications vont-elles infléchir les conclusions de notre rapport ? Croyez bien que si nous le redoutons par pur péché d'orgueil, nous le souhaitons à l'ostéopathie crânienne – et c'est ça qui compte.
Celle-ci est vraiment limitée, comment juger objectivement de l'aspect scientifique d'un concept en étudiant la partie qui n'a pas été mise à jour au niveau des connaissances scientifiques actuelles?
L'ostéopathie crânienne n'est pas un concept mais un champ (une « sphère » disait Sutherland) recouvrant plusieurs concepts (MRP, membrane de tension réciproque, etc.) S'il est toujours possible que nous soyons passés à côté d'un concept particulier – encore faut-il nous le montrer – en quoi cela remet-il en question le reste de notre analyse ? Vous savez, la connaissance fonctionne par parcimonie des hypothèses depuis Aristote, puis William d'Occam. Il s'agit d'essayer de comprendre au moyen du moins grand nombre d'entités possible une gamme de faits. Le problème majeur de votre discipline, l'ostéopathie crânienne, c'est qu'elle prend des concepts un peu flous, pour nimber de mystère une gamme de faits que personne n'a réellement objectivé. Avant de faire des châteaux de sable en Espagne, aurait dit R. Mianajbaro, penseur du XIXe siècle, vérifions d'abord qu'il y a bien du sable. Et Fontenelle l'a très bien décrit.
Au sujet de la tenségrité, non seulement ça n'est pas un concept spécifique à l'ostéopathie crânienne mais encore moins à l'ostéopathie tout court. C'est une notion d'abord architecturale (créée par Buckminster Fuller), puis importée en biologie avec une définition relativement précise puis, devenant concept nomade, a été adapté à de nombreuses sauces (dont celles des héritiers du mystique Carlos Castaneda, qui en firent un agglomérat de prétendus exercices spiritualistes et magiques sinon toltèques, au moins venus des pratiques des natives américains.). Encore une fois, si l'on suit notre méthode scrupuleusement décrite, il est normal que ce concept n'apparaisse pas puisqu'il n'a pas été émis par un des fondateur et continuateurs identifiés.
D'autre part, nous nous interrogeons sur la pertinence d'évaluer a posteriori ce concept puisque vous dites vous même dans la conclusion de votre article :
Le concept étudié est amputé de sa partie la plus récente basée sur d'autres principes que le MRP. J'ai cependant quelques réserves sur ce nouveau concept qui ne fait pas davantage preuve de sa véracité dans le cadre de l'ostéopathie crânienne que l'ancien concept.
(…) Cette erreur rédactionnelle met aussi en évidence qu'il est sans arrêt question de manipulation crânienne sans jamais que soit défini ce terme. C'est embêtant d'évaluer l'ostéopathie dans le champ crânien sans définir le geste que ça implique. Si on fait une recherche dans le document avec les termes "manipulation crânienne", jamais le terme n'est associé à une quelconque définition.
Le principe juridique de l'onus probandi s'applique aussi et surtout en science : la charge de la preuve incombe à celui qui prétend. Il est difficile de nous en vouloir de ne pas avoir défini la « manipulation crânienne » alors que Sutherland lui-même n'a pas pris soin de le faire de manière claire. Cela ressemble aux discussions sceptiques vs. théologiens : des théologiens reprochent souvent aux sceptiques de critiquer la notion de Dieu sans le définir. Mais lorsqu'il s'agit de prendre l'avis des théologiens sur ce qu'est Dieu, personne n'est d'accord. Au final, de quoi parle-t-on ?
D'ailleurs, dans les textes identifiés se rapportant à l'ostéopathie crânienne, « manipulation crânienne » n'est jamais présentée comme un concept central. Il y a comme qui dirait un bug dans l'épistémologie de votre discipline.
Fondement physiopathologique de l'ostéopathie crânienne
La méthodologie est décrite et semble avoir essuyé quelques écueils. Il semble que ces difficultés ne leur aient pas permis de faire une revue de littérature dans les "règles de l'art".
Nous avons tenu précisément le propos suivant : « Nous avons rencontré des difficultés pour mener, dans les « règles de l'art », une revue de littérature systématique compte-tenu principalement : […] », et les raisons sont listées pages 58 et 59. En fait, l'expression « règle de l'art » est mal choisie carcontrairement à d'autres disciplines, , il n'existe à notre connaissance pas de « règle de l'art » pour réaliser une revue systématique de littératuresur des concepts physiopathologiques, surtout issues d'une littérature essentiellement non-indexée ! Ce qui montre que bien plus urgent que la critique de la méthodologie que nous avons prise, serait de faire de la littérature scientifique indexée ! En gros, faire de la recherche d'objectivation. C'est ce qui aurait dû être fait depuis plus d'un siècle. Par conséquent, vous pourriez tout aussi bien dire que ce que nous avons réalisé est une première et ajouter « bravo au CORTECS d'avoir essayé de démêler l'écheveau d'une discipline éparpillée et peu scrupuleuse sur la méthode expérimentale, et d'avoir construit un bon socle méthodologique (probablement améliorable) à quiconque souhaiterait entreprendre un travail similaire » N'est-ce pas ?
Sachant qu'un certain nombre d'ouvrages de référence dont nous avons parlés précédemment ne seront pas cités davantage dans cette partie, il va donc manquer un pan entier des modèles physiopathologiques. Néanmoins, concernant les modèles étudiés, il est évident que leurs conclusions sont valides:
Rappelons-nous : avant de multiplier les modèles, il faut des faits. C'est un des critères de pseudoscientificité que de faire des modèles sans fait caractérisé (il y a même des modèles de physiologie des « vivants dans l'au-delà », à la suite des EVP de Konstantin Raudive). Si malgré tout vous estimez qu'émerge ou ont émergé des concepts spécifiques à la sphère crânienne que nous n'aurions pas traité, n'hésitez pas à nous transmettre les références des études expérimentales qui les soutiennent. Et si vraiment vous argumentez que ces concepts ont leur place dans l'historique de l'ostéopathie crânienne, vous pouvez en faire une synthèse et la rendre publique (car un des critères scientifiques de la connaissance est la connaissance partagée). Nous pourrions ainsi la publier dans un addendum du rapport grâce à vous.
[Sur la fiabilité et la validité des tests ostéopathiques employés dans le champ crânien] Cette analyse repose sur l'utilisation d'une grille d'analyse QUAREL (qui en fait s'écrit correctement QAREL). C'est un outil d'une bonne qualité (Lucas et al, 2013)pour évaluer la reproductibilité de certains tests dans un contexte de revue systématique. Il a cependant quelques limites surtout quand le test en question n'a pas de moyen d'évaluation fiable disponible (une sorte de gold standard). Les Items 9 et 10 sont notamment source de biais pour cet outil où les questions sont subjectives. Ces limites sont soulevées par les auteurs qui pointent notamment:
• L'absence d'un gold standard,
• Pour évaluer la constance de la mesure dans le temps, il manque la preuve du MRP et de mesures fiables.
• L'absence d'interprétation des résultats par les évaluateurs (pour s'avoir si le test a été fait correctement).
En conséquence, les auteurs font un questionnaire simplifié mélangé à celui du groupe Cochrane (risk of bias tool). Ils procèdent à l'ajout d'un item crée pour l'occasion. Ce choix peut être discutable dans le sens où le mélange et la modification de questionnaires valides ne créent pas forcément un outil exempt de biais. Néanmoins, en l'absence d'outils standardisés pour la situation en question, cet outil permet une première approche.
Mais pour faire simple:
• Un risque de biais est quasiment jugé élevé à chaque fois car le contenu d'un item est non décrit dans l'article (souvent les deux derniers items).
• Les scores de corrélation ICC inter-observateurs sont en général assez faibles signant un manque de reproductibilité des tests ostéopathiques.
• Les scores ICC intra-observateurs peuvent être parfois élevés en revanche avec un risque de biais non négligeable.
En résumé, l'analyse faite pour cette partie est intéressante mais l'outil employé pour l'analyse des biais est discutable du fait de ses modifications par rapport à l'outil validé et de l'attribution d'un biais élevé systématique par manque de description du protocole. Les scores ICC parlent d'eux-mêmes, et sans analyser le biais, la reproductibilité est de toute façon faible.
Permettez-nous de récapituler le premier argument de ce paragraphe (que nous étoffons d'une prémisse glanée dans le troisième paragraphe de cette partie « La fiabilité et la validité des tests ostéopathiques employés dans le champ crânien » ; nous intitulerons cette dernière « prémisse (1) »). Si nous vous comprenons bien, cela donne la chaîne logique suivante :
Prémisse (1) - « […] le mélange et la modification de questionnaires valides ne créent pas forcément un outil exempt de biais. »
Prémisse (2) - L'outil utilisé pour l'analyse des biais des études de reproductibilité a été modifié par rapport à l'outil validé ;
Prémisse (3) - Il a été attribué un risque de biais élevé systématique par manque de description du protocole ;
DONC
Conclusion - L'outil pour l'analyse des biais des études de reproductibilité est discutable.
Discutons d'abord de la prémisse (1). Nous sommes d'accord avec vous. Comme vous le faites vous-même remarquer dans le texte à la suite de cette prémisse : « Néanmoins, en l'absence d'outils standardisés pour la situation en question, cet outil permet une première approche. ». C'est ce que nous nous sommes dit lors de la création de l'outil.
Abordons maintenant la prémisse (2). Comme vous l'avez vous-même pointé (voir prémisse (1)), notre outil compile deux outils existants (QAREL et Cochrane risk of bias tool). Ce n'est donc pas qu'une simple modification d'un outil particulier comme vous le dites ici. Nous fondrons donc cette prémisse avec la prémisse (1) dans la suite de l'analyse.
Considérons enfin la prémisse (3). Cette prémisse n'est vrai que pour un item sur sept (l'item n°6). Pour tous les autres items, quand le protocole était insuffisamment décrit, nous avons attribué une incertitude sur le risque de biais. Autrement dit, la prémisse (3) de votre propos est fausse pour 6 items sur 7. Nous avons développé largement l'argumentaire de la création de l'outil qui s'étale pour mémoire de la page 155 à la page 159 du rapport.
Examinons enfin la conclusion de votre argument et tentons de voir dans quelle mesure les prémisses la justifie. Vous dites que notre choix méthodologique est discutable. Certes, mais tout choix méthodologique étant discutable per se, donc ce propos est trivial et il vous appartient d'en choisir un autre. Outre la trivialité de cette critique, il pourrait y avoir quelque chose d'intéressant à en tirer tout de même, moyennant de par exemple (a) pointer le type de biais émergant de l'application de l'outil ; (b) expliquer comment tel ou tel type de biais influence ou modifie les résultats ; (c) faire des suggestions qui permettraient soit d'améliorer l'outil en question pour éviter ou diminuer ces biais, soit de le remplacer par un autre outil existant plus adapté qui ne serait pas venu à notre connaissance. Sinon, cette phrase ne sert à rien.
Quant à la prémisse 3, elle est fausse dans 6 cas sur 7. Pour l'item 6, nous avons justifié notre choix méthodologique page 159 du rapport que nous recitons ici :
« À propos de l'item 6 « Est-il prévu un dispositif pour empêcher les évaluateurs d'avoir accès à des indices additionnels sur les sujets (tatouage, taille, genre, etc.) et qui ne faisaient pas partie du test ? » : étant donnée l'importance que prend le dispositif nécessaire à sa réalisation (voir par exemple l'étude d'Halma et al. de 2008) nous considérerons qu'une absence d'information au sujet de cet item équivaut à l'absence de dispositif, c'est-à-dire à un risque de biais élevé. En toute honnêteté, ce choix pourrait être fait pour d'autres items. Seulement celui-ci nous apparaît très particulier car le dispositif nécessaire, sur le plan logistique, est tellement important que nous pressentons peu crédible le fait qu'aucun mot n'en soit dit dans la publication à cause de contraintes éditoriales ou par simple oubli. »
N'est-ce pas suffisant ?
C'est une chose assez facile de dire qu'une méthodologie est discutable. C'est une autre paire de manche que de la discuter de manière circonstanciée. Mais peut être le ferez-vous, à notre grand plaisir.
Venons-en maintenant à votre dernier énoncé de cette partie :
« Les scores ICC parlent d'eux-mêmes, et sans analyser le biais, la reproductibilité est de toute façon faible. »
Oui, vous avez raison. La volonté de procéder à une analyse des biais relève de plusieurs motifs. Nous n'en évoquerons ici qu'un seul en citant un passage de notre rapport :
« La majorité des études existantes et disponibles échouent à mettre en évidence ces reproductibilités pour tous les paramètres considérés, cela malgré des risques de biais souvent favorables à l'émergence de résultats positifs. » p. 195 (nous surlignons)
Autrement dit, ce que nous apprend l'analyse des biais, c'est que même en utilisant des méthodologies biaisées favorables à l'obtention de résultats reproductibles, les chercheurs échouent à mettre en évidence la reproductibilité des techniques crâniennes utilisées par les praticiens. Ceci est selon nous un indice majeur en faveur du fait que même en améliorant la méthodologie, il est probable que les chercheurs continuent malheureusement à échouer. Pour quiconque souhaiterait entreprendre une étude de reproductibilité d'une technique d'évaluation issue de l'ostéopathie dans le champ crânien, ce fait nous parait essentiel à considérer. Avant l'élaboration de ce rapport, nous avons rencontré des ostéopathes motivés pour faire ce type d'étude avec nous. Dès lors, nous leur avions proposé de nous recontacter quand nous aurions terminé le rapport, ceci pour que d'une part nous puissions éventuellement saisir des contraintes méthodologiques inhérrentes à la pratique que nous aurions sous-estimées, et que d'autre part les ostéopathes intéressés puissent aisément accéder aux travaux déjà réalisés ainsi qu'aux difficultés s'y rattachant pour mesurer l'ampleur de la tâche.
[Concernant l'efficacité thérapeutique]
Les auteurs ont mis en évidence 4 revues de littérature sur les sujets:
Nous observerons que ces quatre revues convergent toutes vers un défaut de preuve de l'efficacité des techniques et stratégies thérapeutiques issues de l'ostéopathie crânienne.
Rapport CORTECS p204
Les auteurs, devant le fait qu'il y ait eu depuis la dernière revue d'autres publications, vont effectuer eux-mêmes leur propre revue de littérature.
Ils relèvent qu'un protocole en triple aveugle (patient, praticien, analyste) n'est pas applicable en thérapie manuelle pour le praticien, mais que les protocoles qui tentent de le faire pour les deux autres acteurs vont dans le bons sens.
Les auteurs vont utiliser l'outil de cochrane cité précédemment, mais seul (sans le QAREL, non adapté à l'analyse).
En résumé, il y a en général un grand risque de biais du fait de l'absence de données sur l'aspect aveuglement des trois acteurs de la recherche, soit sur la randomisation dans le protocole, soit sur les données manquantes. Les articles ne sont donc pas assez détaillés pour que les résultats puissent être correctement analysés, et quand il le sont, il y a des manques qui portent préjudice aux résultats.
Seuls 2 études sortent du lot avec un risque de biais raisonnable (Elden et al., 2013, Haller et al., 2015).
(...)
L'utilité même d'un tel rapport (dont la responsabilité incombait à ceux qui pratiquent l'ostéopathie crânienne d'après les auteurs) est discutable du fait que des travaux de revue de littérature sur le sujet ont déjà été faits (Jackel & Von Hauenschild, 2012, Jackel & Von Hauenschild, 2011, Green et al, 1999), de même que la remise en question du concept existe depuis longtemps et a toujours cours (Gabutti & Draper-Rodi, 2014,Tricot, 2000, Roger & Witt, 1997). Enfin, parfois les outils d'évaluation choisis et modifiés peuvent être discutables.
Comme précédemment, il nous faut pour ne pas perdre l'éventuel lecteur, décortiquer l'argument de ce paragraphe.
Prémisse (1) – Des revues de littérature ont déjà été réalisées sur le sujet.
Prémisse (2) – « […] la remise en question du concept existe depuis longtemps et a toujours cours. »
Prémisse (3) – « […] parfois, les outils d'évaluation choisis et modifiés peuvent être discutables. »
DONC
Conclusion - L'utilité du rapport CORTECS sur l'analyse scientifique de l'ostéopathie crânienne est discutable.
Concernant la prémisse (1), nous n'y trouvons rien à redire puisque effectivement, des revues de littérature ont déjà été réalisées sur le sujet. Non seulement nous les mentionnons dans le rapport mais en plus nous en faisons la synthèse.
Au sujet de la prémisse (2), nous sommes au courant qu'il existe des divergences d'opinions chez les ostéopathes concernant les différents concepts (voir par exemple la page 59 du rapport qui concerne le MRP).
Quant à la prémisse (3), nous en avons déjà discuté : propos trivial et sans fondement (voir ci-dessus).
Regardons maintenant la conclusion et observons dans quelle mesure les prémisses la justifie.
Prémisse (1) À propos des revues de littérature déjà réalisées sur le sujet et sur l'intérêt d'en réaliser de nouvelles nous l'avons expliqué dans le rapport en deux endroits. Pour la revue sur la reproductibilité nous avons écrit ceci :
« Nous constatons que ces trois revues convergent toutes sur le défaut de preuve de la reproductibilité intra et inter-observateurs des tests et procédures diagnostiques issus de l'ostéopathie crânienne. Cependant, nous allons pousser plus loin notre enquête car :
1) de nouvelle études ont été publiées depuis les travaux de Green et al. et Hartman & Norton ;
2) nous avons recensé dans notre recherche systématique un document que le travail de Fadipe et al. n'incluait pas;
3) il n'existe pas de travail similaire au nôtre en français ;
4) enfin, il en va de notre légitimité que de réaliser sa propre analyse, la plus attentive possible. »
Pour la revue sur l'efficacité nous précisons :
« Nous observons que ces quatre revues convergent toutes vers un défaut de preuve de l'efficacité des techniques et stratégies thérapeutiques issues de l'ostéopathie crânienne. En dépit de cette convergence, nous avons tout de même fait notre propre investigation pour des motifs similaires à ceux évoqués lors de notre revue sur la reproductibilité des procédures diagnostiques. »
Nous constatons qu'il est nécessaire d'apporter quelques précisions supplémentaires pour la revue sur l'efficacité :
(a) depuis la parution des revues les plus récentes en 2012 (les revues de Jäkel et Von Hauenschild et celle de Ernst de 2012), il y a eu 5 nouvelles publications ;
(b) ces revues n'ont pas les mêmes critères d'inclusion et de non-inclusion que la notre. La conséquence est que notre revue ne comporte en commun avec ces revues que 3, 3 et 4 publications respectivement (sur les 8 publications que nous avons analysées hors celles publiées après 2012).
Pour conclure sur cette articulation prémisse (1) / conclusion (B), encore une fois ici vous faites une critique à laquelle nous avons déjà donné des éléments de réponse . Nous faisons l'hypothèse que ces passages vous ont échappés.
Prémisse (2) - « […] la remise en question du concept existe depuis longtemps et a toujours cours. »
D'expérience, nous savons malheureusement que même quand la critique d'un concept est ancienne elle gagne toujours à être réactualisée et maintenue (l'astrologie, la chiromancie pour ne prendre que des exemples « faciles », la psychanalyse freudienne pour prendre un exemple plus complexe, etc.).
Prémisse (3) - « […] parfois, les outils d'évaluation choisis et modifiés peuvent être discutables. »
Nous y sommes déjà venu. Dans votre commentaire, c'est un propos trivial et sans fondement qui ne peut justifier en rien la conclusion de votre argument.
En résumé, nous dirons encore une fois que c'est une chose de dire que quelque chose est discutable mais que s'en est une autre de la discuter sérieusement. L'analyse de vos arguments démontre que ceci n'est, hélas, pas le cas.
Concernant le côté du résumé du cadre législatif, il y a un petit problème avec ce paragraphe
C.3 Pratique
Les ostéopathes n'ont pas le droit de pratiquer un certain nombre d'actes s'il ne sont pas "soumis à diagnostic médical préalable de non contre-indication". Parmi ces actes, on note les "manipulations du crâne".
Rapport CORTECS, p53
Or, dans les décrets qui auraient pu être cités en entier, il était fait mention d'un élément supplémentaire qui change le champ d'application de la restriction de prise en charge. Premièrement ça ne rajoutait pas beaucoup plus de lignes et surtout, deuxièmement, ça évitait une erreur factuelle:
Article 3
(...)
Décrets du 27 mars 2007
On voit que cette restriction concerne la prise en charge des nourrissons. Il existe donc un risque de confusion.
Vous avez raison, il aurait fallu préciser que cette contre-indication s'appliquait uniquement pour la prise en charge des nourrissons. Nous nous sommes nous aussi rendus compte de cette imprécision hélas peu de temps après le rendu du rapport. Nous sommes ravis que vous l'ayez pointé du doigt. Même si cette erreur ne change drastiquement rien aux conclusions, nous ferons un addendum au rapport en vous remerciant.
« Cette analyse repose sur l'utilisation d'une grille d'analyse QUAREL (qui en fait s'écrit correctement QAREL). » (nous surlignons).
Exact ! Coquille qui s'est subrepticement insinuée puis répliquée dans l'intégralité du document. Nous avons probablement fondu dans nos cerveaux enfiévrés QAREL, Quarrel en anglais (la querelle ou dispute oratoire), et squirrel, l'écureuil animal-totem d'Albin Guillaud. Merci pour cette remarque.
D'où ma question sur ce rapport, où est la surprise? Il n'y a rien d'étonnant sur les résultats, il y a seulement 79 publications sur pubmed dont la majorité date d'avant 2000. Comment le niveau de preuve aurait pu changer du tout au tout avec si peu d'études récentes? Y avait-il vraiment besoin d'un rapport pour nous faire l'historique incomplet du concept et nous livrer des conclusions que des revues de littérature datant de 2012 et 1999 nous avait déjà apprises (quasi-absence de preuves, manque de reproductibilité de tests, besoin de recherche)?
Votre dernier paragraphe n'est pas piqué des hannetons.
1) personne (et certainement pas le CorteX) n'avait promis de surprise ou quelque chose d'étonnant. Nous ne sommes pas des producteurs de sensationnel.
2) vous dites : « […] seulement 79 publications sur pubmed dont la majorité date d'avant 2000. Comment le niveau de preuve aurait pu changer du tout au tout avec si peu d'études récentes? »
Cinq nouvelles publications sont parues depuis les dernières revues de 2012. Libre à vous de juger que cela fait peu. En attendant, pour des raisons redondantes, nous ne pouvions pas nous contenter de citer les revues existantes en ignorant les publications récentes sous prétexte qu'il y en avait peu. Et bien nous en a pris car les études présentant les plus faibles risques de biais font partie des études récentes.
3) Concernant les revues de littérature, nous en avons déjà discuté.
4) Vous jugez l'historique incomplet ? Voir nos réponses précédentes. Nous estimons qu'aucun des auteurs et concept que vous avez évoqués ne peuvent être cités (aujourd'hui en tout cas) dans un historique spécifique de l'ostéopathie crânienne. Et il est très probable qu'ad nauseam, quand bien même nous aurions eu la chance de citer vos auteurs, seraient venus d'autres professionnels nous enguirlandant pour avoir manqué tel ou tel autre auteur. Sans vouloir être cinglant : peut être n'y avait-il pas besoin d'un rapport comme le notre, certes. Mais posons le problème autrement : comment se fait-il que sans réelle avancée majeure de la discipline en dépit des rapports précédents, les ostéopathes crâniens dans leur majorité ont continué à professer, sans tressaillir, sans faire des « assises » urgentes de leur discipline ? Comment se fait-il qu'il n'y ait pas eu urgence dans votre profession, devant un bazar épistémologique et scientifique pareil ? C'est cette question à laquelle il faudrait répondre.
Collectif de Recherche Transdisciplinaire Esprit Critique & Sciences
Voici une sorte de compilation des réactions au rapport produit pour le Conseil national des masso-kinésithérapeutes sur l'ostéopathie crânienne. Nous mettons l'article à jour au fur et à me...
http://cortecs.org/materiel/rapport-osteopathie-cranienne-reponses-aux-reactions/